Désobéissance civile

La non-violence comme stratégie

La non-violence chez XR est utilisée à des fins stratégiques et non dogmatiques, ce qui nous confère de multiples accès à la convergence avec d’autres mouvements alliant les mêmes buts. De cette manière, les activistes trouvent un cadre assurément non-violent chez XR tout en pouvant agir librement avec d’autres mouvements sous d’autres couleurs.

Les définitions et la compréhension de ce qui constitue la violence et la non-violence varient considérablement : c’est un débat constant. XR ne prétend pas avoir la compréhension la plus exhaustive. Nous utilisons une définition vivante et évolutive afin de guider nos actions et respecter nos Principes et Valeurs :

« Tactiques et stratégies de changement social, en dehors des canaux institutionnels, utilisant des méthodes de protestation, d’intervention, de non-coopération et de solution créative, sans recours à la force, pour obtenir un changement systémique. »

Pourquoi utiliser l’action directe non-violente ?

● Pour exposer la violence du système existant

Nous gagnons la sympathie d’un grand nombre de personnes, qui s’indignent alors contre l’injustice et la violence policière ou étatique utilisée contre nous. L’action directe nous expose à des risques. Par exemple: la haine ou la frustration des personnes touchées par nos actions, ou bien les violences dont la police et le système judiciaire pourraient utiliser contre nous. Nous formons et informons la population avant chaque action afin de rendre conscient·e·s un maximum d’entre nous sur les risques encourus dans une action. Également, quand nous considérons les mouvements sociaux non-violents dont nous nous inspirons, nous devons garder à l’esprit que ces personnes ont tout risqué. Pour certains, cela leur a coûté leur liberté, pour d’autres leur vie.

● Pour perturber la vie courante et forcer le débat sur l’écologie

Dans ce cas, nous n’essayons pas de gagner la sympathie de la population, mais nous les incitons à débattre sur la question de l’écologie. Les gens peuvent nous haïr pour, par exemple, un court blocage de route. Mais l’objectif est de leur faire prendre position. En arrivant à leur prochain meeting, ou le soir à la maison, ces personnes aborderont de nouveau ce sujet ayant marqué leur journée. Et puisque c’est une question de justice, nous espérons que le récit plus large de la population suscitera l’accord avec notre cause.

● En tant que tactique de campagne

L’action directe non-violente est l’une des nombreuses tactiques de désobéissance civile existantes pour mener à bien une campagne. Elle peut être utilisée conjointement avec d’autres actions de désobéissance civile légales ou illégales.
Par ailleurs il est possible d’organiser des alliances ou synergies avec d’autres mouvements sur la base de revendications communes, comme cela s’est fait en Angleterre avec la stratégie « Movement of Movements ». Une revendication commune pourrait par exemple être une meilleure démocratie via des assemblées citoyennes sur les causes spécifiques qui touchent les différents mouvements.

● Pour cibler le pouvoir illégitime

Nous ciblons les institutions ou des personnes que nous considérons comme détenant illégitimement leur pouvoir. Cela est utile face à une opposition intransigeante pour mettre en scène, sous les feux des médias, son pouvoir illégitime, forçant ainsi la négociation et/ou déteriorant son image publique.

Exemples:
En avril 2019 des activistes de XR UK se sont collé·e·s à la maison de politiciens dans le déni de l’urgence écologique, notamment des ministres et chefs de partis.
En mai 2020 des infirmières en Belgique ont fait une haie de déshonneur, tournant le dos à l’arrivée de la première ministre belge suite à sa mauvaise gestion de la crise du covid-19.

● Pour démontrer une opposition

Mettre en valeur une opposition face à un contexte particulier sans pour autant vouloir faire changer un quelconque avis. L’objectif ici est de démontrer qu’une partie de la population est en désaccord profond avec le pouvoir octroyé à une entité.

Exemple: la partie de tennis dans les locaux de Crédits Suisse en octobre 2018 par les activistes du LAC (Lausanne Action Climat). Cette action et les procès engendrés ont permis de cibler des pouvoirs illégitimes en mettant au centre du regard public les investissements immoraux de Crédit Suisse et l’inaction des autorités.

● Pour prendre le haut de l’échelle morale

L’aspect flagrant de l’action directe force la réflexion et le débat. Les critères rationnels du fond de l’action ressortent permettent de reveler les conflits entre des lois et des valeurs.

● Car c’est une histoire avec de nombreux succès

L’action directe non-violente possède de nombreux exemples ayant obtenu divers succès ou ayant fait avancer la cause : le mouvement indépendantiste en Inde, le mouvement des droits civiques aux Etats-Unis, les manifestations antinucléaires à Greenham Common, les manifestations contre la construction de routes comme le contournement de Newbury, Martin Luther King, Gandhi, etc.
N’oublions pas que ces mouvements se sont construits par étapes progressives, commençant par des actions petites mais fortes, sacrificielles, créant le débat et accentuant la mobilisation… jusqu’à devenir une force incontournable amenant une réelle crise politique.

L’action-dilemme

Une action directe non-violente réussie est qualifiée « d’action-dilemme » parce qu’elle place les autorités face à ce qui est en fait un trilemme de 3 options:

– Soit l’opposition réprime violemment les activistes et/ou procède à des arrestations en masse. Ce qui expose aux yeux du peuple et des médias la nature violente du système face à une action légitime en réponse à une crise dont l’État ne s’occupe pas. Cette répression nous attire de la sympathie et de l’attention médiatique, ce qui nous permet de faire passer notre message. Et il y a des chances que cela crée un outrage populaire qui élargira le mouvement.

– Soit l’opposition permet à l’action de se poursuivre, ce qui élargit la zone de sécurité (non-arrêtable) au sein de l’action. Ceci crée un espace pour les activistes et encourage d’autres à s’y joindre, ainsi que des membres du public. Les gens dans un espace de protestation deviennent alors des résistant·e·s. Nous faisons passer le message tout en recrutant largement et devenons un mouvement populaire.

– Soit l’opposition négocie sur nos demandes.

Ces trois options sont des petites victoires pour nous (considérant le fait que la grande victoire est l’obtention d’une justice mondiale pour le climat et la biodiversité). Lorsqu’on organise une action, on essaie de trouver un juste milieu entre une action tellement perturbatrice et choquante que l’opposition nous enverrait la police anti-émeute et une action tellement molle et consensuelle que l’opposition nous laisse simplement faire, ne sachant comment agir, ou tente de négocier. Trouver ce juste milieu nécessite parfois plusieurs tentatives.

La prise de risques juridiques n’est de loin pas une obligation pour rejoindre une action XR car nous distinguons 3 niveaux d’actions:

– Symbolique non-arrêtable (création/performance/diffusion de messages publics)

– À faible risque (bref barrage routier, affichage sauvage)

– À risque élevé (longs barrages routiers, blocage de bâtiments, occupation de lieux publics)

Il est bon de rappeler que les réponses de la police et de la justice peuvent varier, de sorte que rien n’est prévisible à 100%. Nous nous préparons constamment à cela et nous nous adaptons au mieux à chaque situation.

(Photo : Péter Lakatos, XR Hongrie)